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Santé et sécurité au travail : un atout pour l'entreprise et un vecteur de performance économique

Parole d'expert27/04/2021
La crise de la Covid-19 a rebattu les cartes et accéléré les prises de consciences en remettant les questions de santé et sécurité au travail au cœur des préoccupations des organisations. Pour notre expert Elian Blanchon, Responsable du développement des prestations Conseil du Groupe, cette accélération va dans le bon sens car sous-estimer l’importance de la culture sécurité c’est se priver d’un levier précieux de performance et de compétitivité. 
Photo de Elian Blanchon

Elian BLANCHON

Ingénieur de formation, Elian Blanchon est diplômé de Polytech Grenoble en PRIHSE (Prévention des Risques Industriels, Hygiène, Sécurité et Environnement). Il commence sa carrière en 2004 en qualité d’’ingénieur consultant en sécurité au travail dans un cabinet de consulting avant de rejoindre Apave en 2008 en tant que Manager consultant en Santé et Sécurité de l'Homme au Travail (SSHT). Expert des problématiques de SST, il est aujourd’hui Responsable du développement des prestations Conseil.

3 questions à Elian Blanchon, Responsable du développement des prestations Conseil, à propos de la Santé Sécurité au travail

Bonjour Elian. Vous êtes expert des problématiques de santé et de sécurité au travail (SST) chez Apave : pourriez-vous nous rappeler ce que recouvre le terme SST et nous dresser un état des lieux des pratiques en la matière ? 

 

Toute activité professionnelle engendre des risques pour la sécurité d'un travailleur, à des degrés plus ou moins élevés évidemment selon la nature de l’activité. La démarche santé et sécurité au travail vise précisément à identifier, prévenir, réduire et supprimer les risques d'accidents susceptibles de se produire lors de l'exercice d'une activité professionnelle. 

 

Cependant, un environnement de travail exempt d’accidents ne découle pas uniquement du respect des diverses normes et règles. Au-delà de l’approche technico-réglementaire  ou purement normative, une prévention et une maîtrise durables des risques professionnels passent aussi par le développement d’une véritable culture sécurité au sein des organisations. Une entreprise peut par exemple tout à fait satisfaire à l’ensemble de ses obligations réglementaires, être certifiée, et pourtant observer une stagnation de son accidentologie. 

 

On sait aujourd’hui qu’entre 60 à 80% des évènements indésirables en matière de santé-sécurité sont associés à des comportements inadaptés (non-respect de règles, prise de risque, manque de réflexion ou encore habitudes). Développer une culture et des comportements santé-sécurité, pensés comme partie intégrante de la culture d’entreprise et partagée par tous les collaborateurs, est essentiel pour casser ce plafond de verre de l’accidentologie, améliorer durablement la maîtrise des risques mais aussi la productivité, la qualité et la performance économique de l’entreprise.

La Covid-19 et le risque sanitaire ont rebattu les cartes et créé une rupture : les entreprises ne peuvent plus dissocier culture d’entreprise et culture sécurité. Elles doivent désormais se poser une question : quels déterminants, caractéristiques de ma culture d’entreprise, représentent un levier ou au contraire un frein à la culture sécurité et comment les renforcer ou les pallier ?

La SST ne doit pas être pensée comme un à côté de la performance économique mais doit être envisagée comme un contributeur précieux : d’une part car elle permet de réduire les coûts liés aux accidents du travail - le coût que les blessures et les maladies liées au travail font peser sur la société est estimé à 3,3% du PIB de l’Union européenne* – mais elle permet aussi de rassurer les collaborateurs qui peuvent travailler sereinement et être plus performants, les clients qui ont une meilleure image de l’entreprise comme les partenaires et toutes les parties prenantes d’une organisation. C’est aussi un outil pour attirer les talents en leur garantissant une politique avancée en matière de prévention et de protection de leur intégrité, ce n’est pas un message neutre de la part d’une organisation. 

 

Enfin, une étude de l’Association internationale de la sécurité sociale révèle que le coût-bénéfice en matière d'amélioration de la santé et de la sécurité est positif, estimant que chaque euro investi dans la SST rapporte 2,20€. 



Concrètement, comment Apave accompagne aujourd’hui les entreprises dans leurs démarches de santé et sécurité ? 

 

En réalité, toutes les branches d’activité d’Apave contribuent à la SST : qu’il s’agisse de notre activité de contrôle, de formation à la santé-sécurité – nous sommes les leaders dans ce domaine – ou encore des essais et mesures par exemple. 


Mais nous avons évidemment une branche conseil avec un département dédiée à la SST et à l’accompagnement des organisations, de la TPE au grand groupe, dans leur démarche de sécurité. Cet accompagnement se caractérise par une approche transdisciplinaire unique, qui met en commun nos expertises en prévention des risques, psychologie du travail, ergonomie et management des hommes et des organisations. 

 

Concrètement, nous aidons les entreprises à identifier les leviers et freins au déploiement d’une politique de SST efficace et durable, véritable levier de performance économique. 

 

Nous travaillons autour de trois axes qui nous permettent de comprendre, identifier et analyser les facteurs d’influence interne et externe des comportements à risque. Tout d’abord, nous analysons toute la base documentaire des organisations, les process et les systèmes. Ensuite, nous allons sur le terrain, pour observer concrètement les comportements. Enfin, nous étudions la perception de la culture sécurité par les différentes strates hiérarchiques de l’entreprise, collaborateurs, management et dirigeants. Finalement, nous travaillons d’abord sur les causes plutôt que sur les symptômes : avant de se concentrer sur le « quoi faire », nous travaillons avec les entreprises sur le « pourquoi » et le « pour quoi ».

 

C’est la convergence de ces trois axes qui nous permet ensuite de co-construire main dans la main avec les organisations une politique efficiente de prévention des risques professionnels et d’agir sur les leviers d’actions.

 

 

Après avoir été votée le 17 février dernier par l'Assemblée nationale en première lecture, la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail est en cours d’examen en commission au Sénat. Quelles sont les grandes avancées du texte selon vous ? 

 

La réforme, parce qu’elle invente peu de nouvelles règles mais vient éclairer les règles et les normes existantes, va permettre de renforcer la prévention et la culture sécurité dans les organisations. 

 

Par exemple, le projet vient redonner du sens au document unique, qui est l’outil au cœur de toutes démarches de prévention et de maîtrise des risques. L’évaluation des risques constitue une étape cruciale de la démarche de prévention pour prendre les mesures de protection adéquates afin de supprimer les dangers. Or, les organisations voient encore trop souvent, à tort, le document unique comme un simple document administratif. L’identification, l’analyse et la hiérarchisation des risques devront aboutir à la définition d’un plan d’actions. Il est là le changement fondamental. Ce sont ensuite ces éléments qui sont consignés dans le document unique, véritable colonne vertébrale de la prévention des risques professionnels. 

 

Si les entreprises ont l’obligation de consigner les résultats de leur évaluation des risques dans le document unique, elles ne sont en revanche aujourd’hui pas légalement obligées de mettre en place un plan d’actions. 

 

La réforme remet finalement l’église au centre du village en disposant que les résultats de l’évaluation des risques formalisés dans le document unique devront désormais aboutir à la mise en place d’un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail.

 

Ce programme annuel de prévention des risques doit intégrer la liste détaillée des mesures de prévention, les conditions d’exécution de ces mesures et l’estimation de leur coût. Il doit également contenir un calendrier de mise en œuvre et identifier les ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées.

 

Le projet de loi prévoit également la mise en place d’un passeport formation santé-sécurité qui rassemblera l’ensemble des formations à la sécurité et à la prévention des risques professionnels suivies par le travailleur, dont les formations obligatoires, les attestations, certificats ou encore diplômes obtenus. C’est une mesure intéressante qui va permettre d’inclure individuellement tous les collaborateurs et ainsi de les impliquer plus fortement dans la mise en place et le déploiement de la culture sécurité dans les organisations.

 

*Source : Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail

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